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Saisir, par un discours ouvert à tous vents, comme qui dirait gratuit, l'esprit du temps...

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Mai 2024

Le temps de l’autocritique ?

Qu’est-ce qu’avoir un regard critique sur soi ? En quoi un tel regard, loin, cependant, des autocritiques imposées par les idéologies, du type procès de Moscou, est-il particulièrement nécessaire en 2024 ? Les chiffres nous le disent : nous vivons une époque contre-révolutionnaire, par trop versée dans le kitsch de la pensée. Tout se multiplie et se démultiplie. Les divisions tombent trop juste. Les ennemis sont trop ennemis, les amis faussement amis. Chacun pense immodérément aux autres, les accaparant comme balises, comme repères, dans l’oubli de soi. Un oubli paradoxalement égocentrique. Cela claque comme un chiffre rond. Cela brille comme une campagne de communication. Tout baigne, mais qui se mouille ? Avant d’expérimenter on s’assure, on mesure les risques, le retour sur investissement. Manque de sacrifice, de consommation somptuaire ? Il faudrait travailler le biaisé du regard. Le raccord, la dia-gonale. Mettre un peu de géométrie, fût-elle quelque peu dé-réglée, dans nos visions.

 

Les tensions qui dominent aujourd’hui la société signalent d’abord un manque d’expression. Exprimer, c’est pro-poser. Mettre en avant, mais à la merci d’un regard. S’ob-server. Serf, esclave, mais de soi-même. Se re-garder. Regardons-nous ! Chacun pour soi, dans un miroir concave, convexe, courbe comme la terre. On se reflète dans les cieux. On astique le quotidien, on asticote le voisin, on est démangé par le consensus. Conjonctivite généralisée, allergie aveuglante, gonflement éhonté des paupières, des protections. La République, l’Europe, la science, l’amour : tout doit nous protéger, nous servir. Le monde immonde nous provoque, nous affole : où court-il, pour qui roule-t-il ? Qui sont les victimes, où sont les héros ? À chacun ses idéaux, sa fiction, sa série préférée. On enchaîne les épisodes d’histoires écrites par d’autres pour d’autres encore, qu’ils négligent de connaître. On se sent un peu hors du coup. Tout le monde demande la parole mais c’est une parole qui rapproche faussement, qui moralise comme une parabole. Il faut éviter de plier les mots dans un seul sens. Résister au désir de les rendre plus purs. Nous ne sommes plus la tribu des premiers jours ; trop de temps a passé depuis nos bégaiements initiaux. Seuls devraient s’entendre les discours inédits, dégrisés, post-historiques. Les héros classiques ont définitivement remis leur tablier. Place aux défricheurs, aux arrangeurs de hasard. Aléatoire n’est plus un gros mot en politique.

 

Retenons la leçon des surréalistes : se laisser aller pour mieux se surprendre. A condition de se relâcher. Lâchons du leste, allégeons le fardeau du quotidien. Ne cherchons pas à aller si vite, si loin. Faisons retour sur soi. Sursoyons à nos urgences, à nos humeurs. Soyons à l’écoute de l’autre qui parle en nous. Soyons trans-individuels, per-sonnes audibles et résonnantes. Ne cédons rien aux trans-humanistes, à ces individus silencieux et sournois qui aspirent à un avenir endormi. Échangeons nos ressources, dilapidons notre capital. Éloignons les ratios, les raisons. Jamais un output ne se rapportera à un input, sauf par l’entremise d’un créateur, d’un artiste, d’un original. Si le système nous en-rôle, en-grossons-le ! Par où passe le fil ténu de l’enthousiasme, par ce chas nous nous glisserons. Nous tisserons un monde nouveau, fringant, baigné d’une fièvre surnaturelle. Nous lui donnerons un sens en tous sens. Monde macramé, artisanal, plastique. Nous vivrons des reliefs du plat, des aspérités du plan. Matière et concept, les deux mamelles de l’espoir !

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